"Tout d’abord, et pour débuter par des généralités, le rapport à la peur, ou aux peurs, semble intimement lié à nos personnalités et à nos histoires particulières. Mais aussi au métier exercé. En effet, un apprenti menuisier ou un apprenti paysan n’aura à mon avis pas les mêmes réticences à créer son entreprise qu’un ingénieur salarié tenté par l’aventure du consulting à son compte.

Les métiers artisanaux sont est en effet connus, bien identifiés, et les parcours d’apprentissage adaptés au fait qu’une forte proportion des jeunes choisira la voie entrepreneuriale. A mon avis, le besoin de faire connaître leur métier, de se démarquer, ne constitueront certainement pas pour eux la source principale de doutes et de peurs, du moins au début.

Pour moi, le défi principal a été tout autre lorsque j’ai décidé de quitter le salariat. Issu d’un parcours plutôt industriel mais habitant dans une région peu dotée de ce côté-là, ma priorité a consisté à prendre mon bâton de pèlerin pour d’abord faire connaître mon métier, qui en plus jouit d’une réputation pas forcément flatteuse : le consulting.

Il a ensuite fallu démontrer aux dirigeants des TPE-PME locales que je pouvais comprendre puis aider leur structure.

Et la peur dans tout ça ? Ici, le rapport à cette émotion pourrait d’avantage se comparer à celui qu’un vttiste amateur éprouve en sortant sur un parcours inconnu et réputé extrêmement exigeant, en compagnie d’amis très bien entrainés. Les compagnons de route sont en quelque sorte nos pairs, notre entourage, un regard extérieur qui pourra être en alternance curieux, indifférent, bienveillant ou moqueur.

Le parcours est par définition faisable, d’autres l’ont déjà bouclé avec succès, mais reste inconnu pour moi. Si j’ai décidé de faire ce circuit, c’est que j’ai tout de même confiance dans le fait que j’arriverai au but. Mais il n’empêche qu’au premier coup de pédale je me demande : où seront les difficultés ? de quel ordre ? serais-je seul ou accompagné quand elles se présenteront ? Puis ces angoisses sont petit à petit masquée ou diluées dans l’effort, le plaisir, la satisfaction d’avoir passé un raidillon empierré, pour mieux resurgir lors de la première chute ou crevaison.

En fin de compte, la peur est pour mois indissociable de la confiance. Pour continuer dans les métaphores, ces deux émotions seraient les deux faces de pièces servant à alimenter la machine que serait mon entreprise."